HOPE IN THE AIR ~ Wilhelmina

hope in the air

Quelques mois plus tôt...
« Tu m'as fait honte ce soir, Ellerina. De quel droit t'es tu permise d'intervenir pour prendre la défense de cette domestique ? » Les yeux baissés mais emplis de rage, Ellerina mourait d'envie de répondre à son père mais savait qu'elle ne ferait qu'aggraver son cas. Pourtant, confortablement installée dans la calèche qui les ramenait au palais, la jeune fille ne regrettait pas ses paroles. Si cela avait embarrassé son père devant les Ravenlock, alors c'était tant mieux. « Tu dois savoir où est ta place. Les Ravenlock font partie de mes plus anciens amis et me fâcher avec eux serait désastreux pour nos affaires. » « Donc je dois me taire pendant qu'ils maltraitent ouvertement une pauvre fille qui fait seulement son travail ? Je sais que tu es devenu cynique, père mais je ne pensais pas que tu accepterais d'être le complice d'une telle cruauté. » Tant pis. Elle n'avait pas pu s'en empêcher. Tenir tête à son père était devenue une occupation à plein temps pour Ellerina, qui écopait souvent de punitions... mais le jeu en valait la chandelle. Faire craquer son père à l'usure afin qu'il abandonne ses projets de mariage était son objectif et rien ne l'en détournerait. « Tais-toi petite sotte ! Je sais très bien que tu es intervenue uniquement pour me mettre dans l’embarras et non parce que tu te soucies du sort de la domestique. Lorsque nous serons rentrés, tu resteras dans ta chambre et tu réfléchiras à tes actes. »

Maintenant...
Heureusement que les punitions de son père ne duraient jamais bien longtemps, songeait Ellerina tout en profitant du doux soleil de printemps, assise sur le rebord de la fontaine. Elle savait qu'il avait le pouvoir de l'enfermer à double tour dans sa chambre s'il le souhaitait mais s'il s'offusquait souvent du comportement de sa fille, il gardait pour elle une affection qui l'empêchait de l'interdire de sortir. Parfois, la jeune femme s'en voulait de lui infliger autant de tracas. A la mort de la mère d'Ellerina, ils s'étaient éloignés car ni l'un ni l'autre n'avait réussi à apprivoiser leur chagrin. Au lieu de se rapprocher, ils avaient rejeté la faute l'un sur l'autre et étaient devenus deux étrangers, forcés de cohabiter contre leur gré.
Observant l'agitation du marché autour d'elle, Ellerina se perdit dans ses pensées et imagina, comme elle aimait tant le faire, une vie parallèle dans laquelle elle ne serait pas obligée de rentrer au palais après sa petite escapade secrète. Même si elle savait que leur vie était parfois rude, elle enviait le sort de tous ces marchands itinérants qui voyageaient de ville en ville, sans savoir de quoi serait fait demain. Son avenir à elle était tout tracé... Épouser un stupide noble du nom stupide de Peter Yngerame et jouer les épouses dévouées le reste de sa vie.

Mais un visage parmi la foule la fit brusquement revenir à la réalité : elle n'en avait pas été sûre au premier coup d’œil mais à présent qu'elle dévisageait la silhouette, elle la reconnaissait bien. Se levant prestement, le visage à demi caché par une vieille étoffe qui était censée la faire passer pour une fille du peuple, Ellerina se dirigea vers la domestique qu'elle avait rencontrée un soir, chez les Ravenlock. Sa raison la suppliait de laisser la pauvre enfant seule ; après tout, elle risquait de l'effrayer plus qu'autre chose, et après avoir observé comment elle était traitée chez ses maîtres, la domestique ne devait pas avoir beaucoup de moments de répit. Mais s'il y avait bien une chose qui caractérisait Ellerina, c'était sa curiosité et à cet instant, son instinct lui ordonnait d'interpeller la jeune fille. « Bonjour. » dit-elle simplement en arrivant à sa hauteur, dévoilant une partie de son visage. Elle n'était pas certaine que la domestique la reconnaîtrait mais généralement, ses yeux bleus perçants suffisaient à rendre la mémoire aux gens qu'elle rencontrait. « Tu te souviens de moi ? Je suis venue dîner un soir chez les Ravenlock avec mon père et sa femme. »